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Art-thérapie et/ou art de la rencontre




Qu'est-ce-que la rencontre sous son aspect littéraire?
 
"Circonstance fortuite, hasard." , " Fait pour deux personnes, de se trouver en contact.", "Aller à la rencontre de, au devant de." , "Engagement, combat, match." , "Discussion.", "Fait de se trouver en contact.", " Fait de rencontrer quelqu’un, de se trouver en sa présence sans l’avoir cherché.", "Entrevue, conversation concertée entre deux ou plusieurs personnes.", "Fait, pour deux choses, de se rencontrer, d’entrer en contact ou en collision.", " Au billard, choc de billes venant de directions opposées."

Je vais prendre quelques lignes de cet article, pour revenir un moment sur cette palette de définition. En effet, dans son sens littéraire il est limpide que le hasard y joue un rôle, et il est soutenu par la notion "d’entrer en contact" : objets matériels entrant en choc (ex : billes), êtres vivants (ex : Homme), entrant en contact.

Je mets en lumière également l’aspect compétitif de la rencontre (ex :sportif) où celle-ci reste singulière mais du coté de la confrontation avec le ou les adversaire/s.

J’ai aussi laissé ma curiosité se diriger vers les racines de ce mot : "le grec ancien en a deux : apantò, rencontrer, et tugkàno, rencontrer par hasard. Ce verbe est de la même racine que tuchè, la rencontre due au hasard, involontaire, inattendue. On trouve également un autre substantif, sumbolè qui signifie rencontre, rapprochement, contribution, engagement (dans un combat).". Ce passage provient de l’article " La rencontre : trouvaille ou retrouvaille ? " de Jacques SEDAT permettant d’appuyer un peu plus les définitions précédentes, dans ses divers sens : la notion de hasard, de duel, et de contact. Il en va ainsi des racines latines : "bas latin incontra, auquel a été ajouté le préfixe re- qui est associé à la répétition ", "On trouve le mot français " rencontre " pour la première fois au XIIe siècle, pour désigner le coup de dés qui décidait du combat entre deux seigneurs ou deux troupes. Au XVIe siècle, le sens s’élargit à celui de coïncidence, conjoncture, occurrence, hasard ". Ces extraits du même article ramènent également à l’aspect hasardeux de la rencontre mais en ajoutant un plus, le préfixe " re- ". Mais quel sens ce mot tient-il dans notre quotidien ? A quoi associe t’on cette notion de répétition dans la rencontre ?

LA REPRESENTATION DE LA RENCONTRE ET SON UTILISATION AU QUAOTIDIEN 

Il me semble que la rencontre est liée à deux caractéristiques notables, que j'ai mis en lumière grâce à l'article de J.SEDAT: - la première, son imprévisibilité, qui pourrait engendrer variété de ressentis (ex: reviviscence d’élément du passé, recherche dans la rencontre etc), "nous ne savons pas ce que nous aimons en qui nous aimons, nous ne savons pas ce que nous rencontrons en celui que nous rencontrons. ". - Puis la deuxième, sa répétition, liée, je pense, à la première, car inévitable due à son caractère inopiné. C’est surtout au niveau des effets qu’elle engendre sur les exemples donnés ci-dessus, "en repérant précisément ce qu’elle permet de rencontrer, et qui elle permet de rencontrer ". Cette palette de recherche, en partie aboutie, me permet dès à présent d’esquisser un pont menant aux fonctions et caractéristiques du coté de la pratique de l'art-thérapie qui m'a été enseignée (éclairée par la psychanalyse).

J’ai mentionné précédemment, en déclinant tous les sens de ce mot et ses utilisations, que la rencontre avait deux caractéristiques particulières : son imprévisibilité et sa répétition. En outre, il s’avère que ces deux caractéristiques jointes me semblent définir un des concepts essentiels de la psychanalyse, à savoir : le transfert. Ainsi, j’ai choisi un passage du même article afin de compléter mes recherches et interrogations : "C’est ce quiproquo de la rencontre, marquée par le déplacement dans le temps des scènes du passé – transfert que Freud repère en 1894". Ce que j’entends dans ces paroles, c’est l’espace que prennent les éléments vécus de " chaque un " dans la rencontre. Pour imager ces propos, je vais utiliser une métaphore ; c’est comme si chaque sujet détenait tout au long de son existence un sac empli des scènes de son passé et lors d’une rencontre il en sortait quelques unes. En revanche, il ne faut pas oublier que chaque sujet arbore aussi sa singularité, ce qui rend les rencontres uniques en leurs genres. De plus, le mot " quiproquo "
vient ajouter un nouveau paramètre. Il met en exergue la caractéristique du hasard dans la rencontre, mais y adjoint la fonction de recherche à travers elle, la rencontre avec l’objet : "Ce que Freud exprime dans ce passage, c’est que toute trouvaille de l’objet n’est qu’une retrouvaille, c’est-à-dire une répétition de la trouvaille. Autrement dit, dans la recherche de l’objet, il s’agit essentiellement de " rétablir le bonheur perdu ". Effectivement, la recherche de l’objet tient sa source dans la relation à la figure de la mère qu’on ne quitte jamais, ou que l’on tend à retrouver : "Cette satisfaction doit avoir été vécue auparavant pour laisser derrière elle le besoin de sa répétition ".

Dans la suite de l’article, l’auteur parle de la part d’ombre de la répétition dans la recherche de l’objet, ce que S. FREUD nomma " la contrainte de répétition " en 1913. C’est ce qui "ultérieurement, dans la rencontre sur la scène de la réalité, deviendra inquiétante ". La contrainte de répétition est associée à plusieurs mécanismes que S. FREUD a définis (pulsion de mort,...) comme des termes de résolutions, ce qu’il appela le travail du deuil de la relation à l’objet.

Cette part d’ombre peut être résistance dans la rencontre thérapeutique, car elle est prise dans le mécanisme de répétition. Elle peut obstruer la sortie de ce mécanisme qui permettrait de " renvoyer enfin le passé au passé, s’alléger du passé dans une allégresse qui pourrait rendre possible un présent dans la mesure où il n’est de présent que par et dans la présence à l’autre et à soi-même ".

Dès à présent, il m’est possible d’élaborer quelque peu sur la fonction du transfert dans la rencontre thérapeutique. Il est essentiel d’en intégrer les fondements : " Le transfert n’a pas une réalité propre au présent, il n’a pas une consistance dans l’actuel de la relation à l’analyste. Il est cette croyance dans la toute-puissance de la pensée, de rencontrer enfin l’objet perdu ". En effet, le transfert est le pilier qui permet l’édification de la rencontre entre l’analysant et l’analysé : " Le transfert qui est destiné à devenir le plus grand obstacle de la psychanalyse devient son soutien le plus puissant quant elle parvient à le deviner à chaque fois et à le traduire au malade ". Il se doit d’être assimilé du coté de l’analysant puis constamment remis au travail, afin de laisser libre celui de l’analysé.

Pour conclure ce thème de recherche, je citerai un passage de " l’amour de transfert ", qui se trouve dans la préface tenue par Nathalie DUMET. Il me semble concentrer tous les éléments sus cités et esquisser un tableau de la rencontre thérapeutique, du coté de la psychanalyse: " Surtout, le psychanalyste doit " tenir son cadre ", comme on dit familièrement, c’est-à-dire demeurer dans l’attitude de réserve ". En somme, ce dernier extrait de texte me semble incarner un élément essentiel à l'élaboration de la pratique de l'art-thérapie, une sorte de règle "d'art" de la rencontre...

Références de l'article:
SEDAT – Jacques. La rencontre:
Trouvaille ou retrouvaille?. Cairn.info/revue
Adolescence, 27/08/2008, N°63,
page 201 à 219

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